Accéder au contenu principal

REACTION DE L'ADF A L'ADOPTION DE LA REFORME TERRITORIALE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE

L'ADF a tenu à réagir aujourd'hui au vote solennel des députés sur le projet de loi relatif à la réforme des collectivités territoriales qui a eu lieu hier après-midi.

Lire le communiqué de presse du Président de l'ADF, Claudy LEBRETON, à ce sujet

Retrouvez également ci-dessous l'intégralité de l'explication de vote de Bernard DEROSIER (Président du Conseil général du Nord) prononcée à l'occasion de ce scrutin : 

« Il faut simplifier le millefeuille. » De cette déclaration imagée du Président de la République, il ne fallait pas imaginer le désir d’une pâtisserie de meilleur goût, ni même une intention politique de bon aloi vis-à-vis de nos collectivités territoriales. Bien au contraire, nous devions comprendre qu’il fallait modifier le cadre institutionnel français pour que la gauche ne soit plus majoritaire dans les régions, dans les départements, dans les villes.

Pour l’atteindre, tous les moyens ont été utilisés. Nous n’avons jamais obtenu de réponse de la part du Gouvernement à des questions précises que nous lui avons posées tout au long du débat sur les atteintes graves que vous portez à la décentralisation et à la démocratie locale. En outre, ce qui illustre bien votre méthode, c’est le dépôt d’amendements de fond, à la dernière minute : l’un faisant de ce texte une loi électorale et l’autre, déposé à deux heures du matin dans la nuit de mercredi à jeudi sans aucune information préalable, visant à prévenir une annulation de la part du Conseil constitutionnel pour non-respect de la parité parmi les conseillers territoriaux.

Et pourtant, nous aurions pu nous retrouver pour élaborer ensemble une nouvelle étape de la décentralisation en organisant une meilleure répartition des compétences entre les trois niveaux d’administration territoriale – commune, département, région –, trois niveaux que l’on retrouve dans la plupart des pays de l’Union européenne. C’est là que se situait la priorité en termes de simplification.

Nous aurions pu, ensemble, préparer l’achèvement de l’intercommunalité, dispositif qui remonte à 1999, proposé par un ministre du gouvernement Jospin et combattu par la droite. Il est imparfait, certes, mais vous n’avez pas retenu nos suggestions pour que ces établissements publics de coopération intercommunale qui rationalisent la vie communale, soient des lieux de vie démocratique, efficaces, respectueux des intérêts des citoyens de toutes les communes de France.

Au contraire, vous avez voulu rétablir la tutelle de l’État sur les élus locaux parce que, aujourd’hui, vous avez la charge de cet État qui devient de plus en plus un État-UMP.

Non contents d’étrangler financièrement les collectivités locales en prétextant la crise – elle a bon dos –, vous portez un nouveau coup aux services publics de proximité assurés par les communes, les départements et les régions.

Reprenons les aspects de votre projet avec lesquels nous sommes en désaccord profond.

La création des conseillers territoriaux tend à affaiblir la démocratie locale. Leur nombre est désormais connu et, sur ce point, rien ne nous a été épargné. Il a fallu contraindre le Gouvernement à respecter la compétence du législateur pour fixer ces règles affectant le fonctionnement des assemblées locales, alors que le même Gouvernement avait pourtant envisagé de régler cette question au moyen d’une simple ordonnance. En définitive, c’est par un amendement présenté à la sauvette que cette précision a été intégrée au projet de loi.

En revanche, je n’ai pas entendu les défenseurs de cette réforme nous apporter la preuve que les 3 471 futurs élus seraient bien à même d’être effectivement présents dans deux assemblées délibérantes distinctes et que les relations de proximité entre les citoyens et ceux chargés de décider en leur nom ne seraient pas remises en cause. Que dire des incroyables disparités démographiques entre les futures circonscriptions électorales des conseillers territoriaux tant elles sont considérables entre les régions et entre les départements.

Ensuite, ce projet de loi n’a cessé de varier sur les modalités de la désignation de ces futurs élus. Sur ce point comme sur d’autres, nous sommes en pleine confusion. Certes, le Gouvernement a renoncé au scrutin au tour unique, mais la méthode utilisée est inacceptable sur la forme. Et je dénonce le cavalier que vous avez utilisé pour introduire ce dispositif dans un texte qui n’avait rien à voir avec le sujet.

S’agissant de la parité, l’amendement auquel je faisais allusion tout à l’heure est un cadeau empoisonné fait aux femmes qui aspirent à accéder aux fonctions électives.

Sous prétexte d’intégrer les conseillers territoriaux dans le calcul du financement public des partis politiques, il exclut dans l’immédiat les femmes candidates de ce calcul complexe. Celles-ci devront attendre 2020 pour espérer être prises en compte dans la détermination de ce financement !

Plus de femmes dans les conseils municipaux, nous dites-vous ! Quel lot de consolation inacceptable ! Tout à l’heure M. le secrétaire d’État Marleix dénonçait le fait que les socialistes n’avaient pas beaucoup de présidences féminines dans les régions, mais vous n’en avez aucune, pour ce qui vous concerne ! Pourquoi parlez-vous de corde dans la maison d’un pendu ?

Enfin, après avoir annoncé la suppression de la clause générale de compétence dans le projet initial, laquelle a permis un aménagement du territoire digne de ce nom, vous la maintenez dans une formulation alambiquée.

Tant de recherches pour choisir la formule adéquate étaient bien inutiles, car la politique de compression des dotations de l’État aux collectivités locales menée depuis quelques années, conjuguée à la réduction de leurs ressources fiscales autonomes, contribue tout aussi efficacement à anéantir la capacité d’initiative de ces collectivités !

Telles sont, mes chers collègues, toutes les raisons qui amènent, aujourd’hui le groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche à dire au Gouvernement qu’il vient de porter un mauvais coup à la démocratie locale, à la démocratie, tout simplement, donc à la République !